J’ai lu « En finir avec la rivalité féminine » et j’en suis encore retournée. C’est un livre qui dit tout sur la jalousie et l’envie qui teintent les relations des femmes entre elles.
La sororité, on en parle beaucoup mais les choses sont loin d’être aussi jolies qu’on voudrait le faire croire.
On a du mal à l’admettre, parce que ce n’est pas très glorieux, mais “les femmes qui harcèlent, qui jalousent, qui humilient” existent et elles sont nombreuses.
Après avoir décortiqué “Le syndrome d’imposture” propre aux femmes, Élisabeth Cadoche, journaliste, et Anne de Montarlot, psychothérapeute, veulent « En finir avec la rivalité féminine » (le livre est ici).
Dans leur nouveau livre, elles observent, analysent et donnent à comprendre pour qu’on puisse agir et arrêter de se détester les unes les autres.
Les chiffres de la honte
Certains chiffres donnés dans le bouquin nous mettent la honte. En 2016, une étude révélait que les mots pute et salope étaient mentionnés 3000 fois par jour sur Twitter par 38,7% d’hommes et 61,3% de femmes.
Je vous vois, là, croire que vous ne faites pas partie du problème, que vous ne faites que “subir” les jalousies d’autres femmes, mais regardons-nous toutes dans une glace: on alimente parfois la machine.
On n’est pas toutes aussi brillantes, détachées et charmantes qu’on le voudrait.
« Toutes les femmes bitchent »
Elisabeth m’explique en se marrant: “Quand on a interrogé les femmes, au début, on avait droit à: Ah non, la rivalité, moi jamais! On leur disait: Bah bravo, tu es une licorne… Parce que ça n’existe pas de ne pas ressentir ça. Toutes les femmes bitchent!”
Admettre qu’on est en partie responsable d’un problème, c’est déjà être en bonne voie de le résoudre.
Je bitche, tu bitches, nous bitchons. Ok, c’est dit. Reste à comprendre: pourquoi?
« Le problème, ce n’est pas la rivalité »
« Le problème, ce n’est pas qu’il y a de la rivalité”, me dit Elizabeth. “La rivalité, elle existe aussi chez les hommes, sous forme de compétition saine. Mais nous, les femmes, on ne nous a pas appris à gérer cette rivalité. »
Les hommes ont grandi avec des images de gladiateurs et de chevaliers. “Les femmes n’ont pas eu droit à ces récits-là”, note Anne.
Nos récits à nous, ce sont les contes de fées où la belle-mère jalouse la beauté de sa belle-fille (Blanche-Neige) et où des sœurs se font la misère (Cendrillon).
« Comment ne pas intégrer cette dimension de rivalité quand elle fait si précocement partie de notre culture? », s’interrogent Anne et Elisabeth dans leur bouquin.
« On nous a appris à être douces, à être dans l’abnégation, à nous occuper des autres, à être bien sages », rajoute Elisabeth.
Résultat? « Une fois que le goût du pouvoir vient aux femmes, elles répugnent à l’assumer » et « quand les femmes réussissent, elles n’arrivent pas à jouir de leur succès ».
« Quand l’envie de gagner vient aux femmes, leur énergie devient agressivité et se retourne contre l’autre qu’on veut voir échouer”, écrivent-elles.
Avoir une femme comme patron: pourquoi c’est (souvent) l’enfer?
En lisant ce livre, d’autres chiffres me choquent: 63% des femmes (contre 52% des hommes) préfèrent travailler pour un homme que pour une femme.
Je ne peux pas leur jeter la pierre: je n’ai été dirigée qu’une seule fois par une femme et ce fut l’expérience la plus atroce de ma vie professionnelle.
Est-ce moi qui ne lui ai donné aucune chance ou est-ce elle qui avait un problème avec son autorité?
Les femmes seraient-elles misogynes? « On a des attentes qui sont biaisées », analyse Elizabeth. « On peut accepter d’un leader masculin qu’il soit autoritaire, colérique mais si une femme l’est, on va dire que c’est une peau de vache. »
« Mais pourquoi une patronne serait forcément douce, compréhensive et gentille? », s’interroge-t-elle. « On a de telles attentes par rapport aux femmes que ça ne colle pas à la réalité. »
Le syndrome de la Reine des abeilles
La rivalité existe dans les deux sens. Une femme peut trouver insupportable d’être dirigée par une autre femme. Mais une femme qui dirige une équipe composée de femmes peut développer le « syndrome de la reine des abeilles ».
« Il y a des femmes qui se disent qu’elles se sont tellement battues pour arriver où elles en sont qu’elles se disent: je ne vais pas, en plus, partager. Elles dénigrent alors tout ce qui est féminin.”
Tout ça, c’est la faute de notre mère?
Si nos relations avec les autres femmes sur notre lieu de travail sont aussi conflictuelles, c’est parce qu’elles nous renvoient à notre relation avec notre propre mère. Hé oui..
J’avais fait une constellation familiale et c’est effectivement ce que la psychothérapeute m’avait dit.
Ma boss, dans ses attitudes et ses paroles, me faisait penser à ma mère, avec laquelle j’ai eu des relations compliquées toute ma vie ou à peu près. Du coup, forcément, ça coinçait en permanence.
J’ai fini, d’ailleurs, par être licenciée (et je vous raconte tout ce que mon licenciement m’a appris).
“Avec une patronne, les femmes rejouent leur relation à l’autorité maternelle. Elles vont donc supporter certaines exactions de la part d’un collègue ou d’un patron, mais elles analyseront chaque tentative d’autorité de la part d’une femme à l’aune de leur relation avec leur mère.”
La notion de la rareté qui plombe toutes les femmes sans qu’elles s’en rendent compte
Et puis, il y a cette notion, à laquelle je n’avais jamais pensé aussi directement, mais que je trouve passionnante: celle de la rareté.
« Le leadership, le pouvoir, les hauts postes étant majoritairement détenus par des hommes, les femmes en ont conclu que ces places étaient rares et qu’elles allaient devoir se battre encore plus que les hommes pour les obtenir. »
Nous, les femmes, on est si hargneuses avec les autres femmes, on ne partage pas le pouvoir ou le succès parce qu’on nous a toujours fait croire qu’il n’y en aurait pas assez pour tout le monde.
Ce n’est pas nouveau. Le livre prend l’exemple du bordel: les femmes étaient nombreuses à attendre, lascives, qu’un homme les choisisse.
La compétition faisait du coup rage entre elles puisque les élues, celles qui auraient la chance de quitter leur position de misère, étaient peu nombreuses.
Cette notion de rareté, ça fait que quand une femme réussit dans notre domaine, on se dit que c’est foutu pour nous, que c’est trop tard.
« On a fait croire aux femmes qu’il n’y avait pas de place pour tout le monde »
« Les femmes pensent qu’il n’y a pas assez d’opportunités de travail, pas assez d’hommes à rencontrer, à épouser, qu’elles n’ont pas assez d’argent, bref, tout est vu sous le prisme de la limite, de la quantité restreinte; comme si le succès et l’abondance n’étaient pas au rendez-vous de la même façon chez les hommes et chez les femmes », peut-on lire dans « En finir avec la rivalité féminine ».
« On a fait peur aux femmes: on leur a fait croire qu’il n’y avait pas de place pour tout le monde. Mais c’est faux”, tonne Anne.
« Je repense souvent à cette scène dans Notting Hill où Julia Roberts, face à Hugh Grant dit: Je suis juste une fille qui se tient devant un garçon et qui lui demande de l’aimer. Elle le supplie de l’aimer, comme s’il n’y a que lui qui pouvait le faire. C’est bien fait, mais non. Il faut arrêter ça. »
La vérité: c’est qu’on en veut aux autres femmes parce qu’on n’a pas confiance en nous
La rivalité féminine, elle est provoquée par l’éternel problème de nos vies: le manque de confiance en soi.
« Nous ne sommes pas en compétition avec d’autres femmes en fin de compte, mais avec nous-mêmes – avec ce que nous pensons de nous-mêmes », dit Emily V. Gordon, auteure de Why women compete with each other.
« Nous regardons les autres femmes et voyons, à la place, une version de nous-mêmes qui est meilleure, plus jolie, plus intelligente, qui a un truc en plus. »
« C’est un miroir déformant qui reflète une version inexacte de qui nous sommes, mais nous nous en prenons quand même à elle, parce que c’est plus facile. »
Comment on sort de la rivalité féminine?
Mais comment on sort de cette rivalité qui pollue nos relations au travail, dans nos amitiés et dans notre famille?
En admettant qu’on fait partie du problème
Il faut commencer par admettre qu’il y a un problème. Identifier nos travers et les désapprendre. “Nous ne sommes pas au-dessus des autres femmes mais dans le même bateau.”
En exprimant sa colère
Il faut exprimer ses émotions pour éviter l’atroce passif-agressif, sport dans lequel les femmes excellent. Les autrices rappellent: « La colère est une émotion, l’agressivité est un comportement. »
Anne précise: « Je suis en colère, c’est une émotion, je vais te taper dessus, c’est un comportement. »
Elizabeth ajoute: « Être envieuse ou jalouse, c’est normal, c’est une émotion, un comportement humain normal. Mais si on se met à causer du tort, à propager des rumeurs… ça devient toxique et dangereux. »
En se rappelant qu’on a toutes une temporalité et un rythme différents
Se rappeler que nous avons toutes une temporalité, un rythme différents. « Nous n’empruntons pas toutes le même chemin, nous ne disposons pas toutes du même temps. »
Pourquoi se sentir en rivalité avec une femme qui a réalisé un rêve professionnel qu’on caressait dix ans auparavant? « Il ne s’agit pas d’une course mais bien d’une vie où l’essentiel ne peut se réduire à des chiffres. »
En arrêtant de bitcher
“Arrêtons de bitcher!”, me disent les autrices d’une même voix. “Arrêtons de critiquer les autres femmes sur leur physique. On peut dire: je n’aime pas son bouquin mais dire: oh elle a grossi, elle a fait du botox… C’est facile d’arrêter. »
« Tout ça, ça a à voir avec la confiance en soi. On projette nos failles sur les autres femmes. » Plus on vieillit, moins on est dans la rivalité avec les autres femmes.
« On s’est rendu compte que l’âge auquel les femmes ont le plus confiance en elles, c’est 60 ans. Mais on ne va pas attendre d’avoir 60 ans pour arrêter de bitcher! C’est dommage d’attendre jusque-là pour être dans la sororité. »
Pour sortir de la rivalité féminine, « il faut se connaître, sortir du poison de la comparaison, arrêter de se comparer, arrêter de toujours chercher une validation de l’extérieur. »
« Vous savez qui vous êtes, ce que vous voulez, concentrez-vous là-dessus. »
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