On me demande sans cesse si mon enfant unique se sent seul ou s’il ne risque pas de s’ennuyer. Pourquoi il faut arrêter de poser cette question aux parents d’enfant unique.
Je suis maman d’un enfant unique par choix. Je viens d’une famille nombreuse (nous sommes quatre enfants), je sais donc ce qu’est une fratrie, et ça ne m’a pas traumatisée.
Mon âge me permettrait d’ailleurs encore de faire un deuxième enfant. Mais l’envie ne revient pas et c’est très bien comme ça.
Je vous avais déjà expliqué dans le détail pourquoi je n’aurai qu’un seul enfant.
“Il est enfant unique? Il se sent seul, non?”
Mon fils a 6 ans et enfin, autour de moi, les gens commencent à se faire à l’idée qu’il restera enfant unique. J’entends de moins en moins la phrase: “Et le petit deuxième, c’est pour quand?”
Cette interrogation pénible a été remplacée par une autre phrase que je n’en peux plus d’entendre: “Mais il doit/va se sentir seul, non?” ou sa variante: “Mais il doit/va s’ennuyer”.
Voilà tout ce que j’ai envie de vous dire à ce sujet.
Il y a une différence entre être seul et se sentir seul
Il y a une différence entre être seul et se sentir seul. On peut être seul et avoir un monde intérieur si riche qu’on ne se sent jamais seul.
Il est possible d’apprécier suffisamment sa propre compagnie pour ne pas être perpétuellement en recherche de la compagnie des autres.
Il faut vraiment distinguer la solitude, qui est un état de souffrance, avec le fait d’être seul, qui est un état de fait pas forcément problématique.
On peut se sentir seul en étant très entouré. On peut se sentir seul au milieu du bruit, de l’agitation, d’amis et dans une grande famille. On peut se sentir seul parce qu’on est incompris.
Un enfant unique se sent seul, mais pas plus ou moins qu’un autre
Mon enfant unique se sent peut-être seul parfois, mais pas plus ou moins qu’un d’autre. Il a une tolérance à la solitude bien plus grande que les autres, en fait.
Il se sent moins vite seul qu’un enfant habitué au bruit et au monde autour de lui.
Je crois que finalement, cette question traduit l’angoisse des gens qui ne supportent pas/plus d’être en leur propre compagnie.
Au moindre temps mort, dans la queue à la poste ou au supermarché, assis face à notre café en attendant une copine, on dégaine notre smartphone parce qu’on ne supporte pas d’être seul, face à nous-même et nos pensées.
Quand les gens voient mon enfant unique, ça les renvoie à leur propre crainte de se sentir seul.
C’est un peu comme les gens en couple qui trouvent qu’être célibataire, “ça doit être triste”, sans comprendre que certaines personnes sont très heureuses en avançant en solo dans la vie.
C’est quoi le problème avec l’ennui?
Et par rapport à l’ennui, j’aimerais qu’on m’explique pourquoi l’ennui est à ce point diabolisé. Enfin, en fait, je sais: les réseaux sociaux nous ont fait croire que l’ennui, c’était mal et qu’il fallait donc tuer l’ennui en scrollant.
Mais les études le prouvaient hier et le prouvent toujours aujourd’hui : l’ennui stimule la créativité et la productivité.
Quand on s’ennuie, l’esprit divague, on pense à tout et à rien de précis en même temps. Et ça fait de la place à l’inspiration. C’est aussi quand on s’ennuie et qu’on met notre esprit au repos qu’on trouve des solutions à nos soucis.
Moi, j’aime bien voir mon fils s’ennuyer. Déjà, parce que dans nos vies surchargées, les plages d’ennui sont rares. Et ensuite, parce que passé les 5 premières minutes à se traîner, il se trouve spontanément un truc à faire.
S’ennuyer, c’est faire de la place à son monde intérieur. C’est justement apprendre à se contenter de soi-même, et à ne pas être perpétuellement en recherche de l’autre pour être heureux.
Ça rejoint ce que je disais au début: se trouver des solutions et des projets quand on s’ennuie, ça permet de ne pas se sentir seul.
On peut s’ennuyer et se sentir seul dans une fratrie
Il y a quelque chose qui me dérange dans ces deux réflexions, c’est que dans un cas comme dans l’autre, on sous-entend que quelqu’un doit venir nous sauver de notre éventuelle solitude et de notre possible ennui.
Mais un petit frère ou une petite sœur ne devrait pas avoir ce rôle-là. Je le redis et j’en suis persuadée, pour l’avoir expérimenté: on peut s’ennuyer et se sentir seul dans une fratrie.
Parce qu’on doit attendre notre tour, parce que le frère ou la sœur prenne plus de place ou réclame plus d’attention…
J’aime l’idée d’apprendre à mon enfant unique que son bonheur dépend surtout de lui. Qu’il doit se trouver ses petites solutions pour s’épanouir personnellement.
Bien sûr, élever un enfant unique est un défi. Et j’en reparlerai dans un autre article. Mais ce n’est pas plus ou moins un défi que d’élever un enfant au cœur d’une fratrie.
Les problèmes auxquels on fait face en tant que parents d’enfant unique sont simplement différents. Pas plus simple, pas plus compliqué.
Il y a des phrases que je ne dirai jamais une maman de plusieurs enfants
Je ne me permettrai jamais d’aller dire à une maman de plusieurs enfants: “Tu ne trouves pas que ton plus jeune a du mal à trouver sa place au coeur de votre famille?”
Ou bien “Tu ne vois pas que tu accordes plus de temps à cet enfant-là plutôt qu’un autre et que cet autre en souffre?”, j’aimerais qu’on arrête de sous-entendre que mon choix risque de rendre mon enfant malheureux, à terme.
Oui, n’avoir qu’un seul enfant est encore quelque chose d’assez marginal. Mais ça ne veut pas dire que ce choix-là est moins bon qu’un autre.
Mes angoisses et mes questionnements de maman déjà bien suffisants comme ça.
Aucun parent ne détient les clés du bonheur de son enfant. Aucun parent n’a tout à fait raison ni tout à fait tort. On avance tous comme on peut, en espérant que le résultat de nos errances donne quelque chose de pas trop moche à la fin.
Abonne-toi à ma newsletter TRANSPARENTE pour recevoir un mail de ma part chaque dimanche. J’y parle en toute honnêteté (encore plus qu’ici) de ma vie de maman.
Rejoins-moi sur Instagram, Facebook, YouTube et Pinterest. Si tu aimes le blog, tu peux aussi me payer un café pour le soutenir. Enfin, tu peux également te procurer mon Guide de la Belgique en famille qui rassemble 100 activités à faire en famille à travers tout le pays et mon livre Journal de Bord d’une maternité décomplexée.
3 comments
Je suis enfant unique, et me retrouver seule face à moi-même ne me pose effectivement pas de problème (j’ai plus de mal avec le bruit)… Par contre, c’est une des raisons qui fait que je voulais absolument 2 enfants… A certains moments, cela m’a pesé d’être seule car finalement l’attention des parents est toujours focalisé sur soi vu qu’il n’y a personne d’autre dont il faut s’occuper… pas d’échappatoire possible… et c’était parfois étouffant.
Je suis fille unique et ma fille est fille unique aussi. Je n’ai aucun traumatisme d’être fille unique et je pense l’avoir toujours bien vécu. Quand je dis aux gens que j’ai ni frère ni sœur, certains sont surpris. Apparemment je suis une personne généreuse, sociale. A vrai dire, ça me surprend toujours ce genre de commentaires. Faut-il avoir des sœurs et des frères pour être agréable en société, généreux, sociable, ouvert d’esprit ?! Ma fille est bien dans ses baskets. Oui, elle a demandé un petit frère, une petite sœur. Mais plus maintenant. Elle a 8 ans. On est un triangle solide, incassable. On s’amuse beaucoup à 3 et on s’ennuie aussi. Ma fille est sociable, attentive aux autres, respectueuse des autres et n’a aucun problème à se faire des amis et à les garder. Je voulais deux enfants et la vie en a voulu autrement. Et c’est pas grave. C’est même génial. Merci pour cet article et tous les autres.
Enfant unique moi-même et j’ai un fils qui restera unique aussi (il va avoir 6 ans dans 3 mois), j’en ai plus qu’assez des réflexions des gens. Celle que tu cites et celles qui sous-entendent (et il y en a beaucoup) que si tu n’as qu’un seul enfant, tu es moins maman que si tu en as plusieurs. Ou alors que tu ne peux pas avoir de difficultés, le fameux “toi tu n’en as qu’un”.
Personnellement le seul moment où j’ai souffert d’être enfant unique a été à la mort de mes parents (ils sont morts à 11 mois d’intervalle). Mais, soyons honnête, si j’avais eu une fratrie, on aurait pu ne pas s’entendre, se disputer pour l’héritage,… ou tout aurait pu bien se passer. Je ne le saurais jamais mais si je suis sure d’une chose c’est qu’avoir des frères et sœurs est loin de garantir des “amis pour la vie” ou une absence de solitude.