Il a tout quitté pour être enfin heureux: l’interview qui fait réfléchir

by seayouson

Pedro Correa a sorti le livre « Matins Clairs » et il fallait que je vous en parle…

Le 29 novembre 2019, dans un auditoire de l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve en Belgique, rempli d’étudiants ingénieurs fraîchement diplômés, un homme à l’accent espagnol prenait la parole.

L’incroyable discours de Pedro Correa à l’ULB

« Le bonheur ne nous tombe pas du ciel en regardant notre vie s’écouler sur des rails construits par d’autres, des rails qui vont on-ne-sait-où, plutôt que de mettre en pratique nos propres envies. »

« Mais pour ça, il faut connaître ne serait-ce que vaguement la destination: ils vont où mes rails? La mauvaise nouvelle, c’est que trouver son bonheur, ça prend toute une vie. »

« La bonne nouvelle, c’est que lorsqu’on sait que ça prend toute une vie, on peut se donner le temps. Pour autant que l’on soit sur un chemin d’authenticité, il n’y a pas vraiment de mauvais choix et rien n’est définitif ».

Il concluait son discours avec ces mots: « Le monde n’a plus besoin de battants, de gens qui réussissent, il a besoin de rêveurs, de personnes capables de reconstruire et de prendre soin… et surtout, surtout, on a tous besoin aujourd’hui, plus que jamais, de gens heureux. »

La vidéo de ce discours a été vue plus de 7 millions de fois. Je fais partie des gens qui l’ont partagée sur les réseaux sociaux.

Je fais partie des gens qui ont trouvé ces mots simples mais pertinents. L’homme qui parlait ce jour-là s’appelle Pedro Correa.

« Ça prend du temps de changer ce qui ne nous convient pas dans notre vie »

Il a fait un Doctorat en Sciences Appliquées et a travaillé comme Project Manager dans une banque pendant quelques années. Et puis, son père est mort subitement.

Et il a compris qu’il était temps, pour lui, d’emprunter une autre route, qui le rendrait vraiment, profondément heureux. Entre la mort de son père et sa nouvelle vie, six ans se sont écoulés.

Pedro Correa est aujourd’hui photographe, il vit de sa passion, et il vient de publier le livre « Matins Clairs » dans lequel il raconte son parcours et nous pousse à changer de vie, à nous réinventer, à faire ce qui nous met en joie.

Je l’ai appelé pour en parler. Sans surprise, ce fut passionnant. « Ça prend du temps » d’oser changer ce qui ne nous convient pas dans notre vie, m’a-t-il dit.

Et il n’y a « pas qu’un seul chemin pour arriver », il y a autant de façon d’atteindre le bonheur qu’il y a de gens sur terre.

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Dans son livre, Pedro raconte ce qu’il a vu en travaillant dans une multinationale. Il parle de cet homme, « pas loin de la retraite », qui avait mis un compte à rebours sur son ordinateur: il décomptait les secondes jusqu’au jour où il quitterait son travail.

« Il avait passé toute sa vie dans la même entreprise. Il était résigné. C’était trop tard pour envisager autre chose. »

« C’est arrivé à mon père: il était à deux ans de la retraite, il rêvait de passer son temps dans le village espagnol où étaient ses racines. Mais il faisait ce travail à Nice, qu’il n’aimait pas tant que ça. Il n’a jamais été en Espagne, il est mort avant de l’avoir fait. »

Dans « Matins Clairs », Pedro Correa, vous racontez ce que vous avez vu en effectuant ce qu’on appelle « un bullshit job », un job vide de sens. C’est effarant. Comment expliquer que les gens continuent à se lever tous les matins pour faire des tâches aussi inutiles et insensées?

J’ai vu des gens qualifiés qui passaient leur journée à imprimer des formulaires signés électroniquement. Je trouvais ça dingue. Ces jobs, on ne les élimine pas parce qu’ils permettent de maintenir le système, de maintenir les gens occupés.

Et ils sont bien payés parce que le salaire compense l’absence totale de sens. Ces jobs ne nous laissent pas le temps de réfléchir.

Le rythme est harassant et nous empêche d’écouter cette voix au fond de nous, qui nous parle doucement.

Elle est écrasée par les voix les plus fortes: celle de nos parents, celle des gens qui nous disent qu’avec l’ancienneté qu’on a, c’est trop bête de partir, celle de notre patron…

Matins Clairs Pedro Correa

Vous dites quelque chose de très juste: personne ne dit jamais qu’on a le droit de prendre le temps, dans la vie. Qu’on a le droit d’exercer un job deux ans et puis un autre, qu’on peut essayer des choses, se tromper. « On nous dit que nos vies seront longues mais elles risquent de sembler encore plus longues si elles sont vides de sens », écrivez-vous.

Même pendant nos études, on ne nous dit pas ça. On voit ces jeunes à qui on met une pression folle pour éviter qu’ils redoublent une année.

Moi j’ai doublé une année, c’était la crise totale. Mais qu’est-ce que c’est, un an? Est-ce que parfois, ce n’est pas bien de tester, de voir ce qui nous plait vraiment?

Le bonheur, ce n’est pas prendre l’autoroute mais profiter du paysage et faire des détours si on a envie de faire des détours.

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Vous avez quitté un job, une vie qui ne vous convenaient pas pour vivre de votre art. Ça veut dire que vous êtes désormais heureux H24?

Le bonheur, c’est un objectif théorique. Ce n’est pas une chose dans laquelle on nage au quotidien mais c’est quelque chose qu’on ressent en regardant en arrière.

Ce n’est que le jour où je mourrai que je pourrai dire si j’ai été heureux ou pas. Mais cette extrapolation de ce moment-là aujourd’hui m’emplit de joie, quoi que je fasse.

Le bonheur, c’est une banderole loin devant, une ligne d’arrivée que j’essaie d’atteindre, c’est un travail constant. Oui, le bonheur ça se travaille et ça ne s’atteint qu’a posteriori.

La joie, par contre, on peut la ressentir tous les jours, en étant sur le chemin du bonheur.

Dans la vie, il y a deux voix à écouter: la voix du malaise, qui nous dit qu’on n’est pas là où on devrait être, et la voix de la joie. Il faut se dire: si ça, ça m’emplit de joie, ça serait bien que je fasse ça tous les jours de ma vie.

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Tout quitter, ça fait peur. Comment on fait pour avoir moins peur?

On a peur de manquer, on a peur de mourir, on a peur de se retrouver seul. Les raisons d’avoir peur sont nombreuses.

J’avais peur de manquer d’argent. Mais je me suis rendu compte qu’aucune somme d’argent ne pouvait calmer mes peurs les plus primaires.

Si mon fils se faisait écraser par une voiture, je ne serais pas moins triste si j’avais plus d’argent. J’avais une peur irrationnelle de me retrouver SDF.

J’ai dû faire une longue psychanalyse pour comprendre que l’argent est un moyen, pas une fin. J’ai compris qu’on a moins besoin d’argent que ce qu’on pense.

Certains ont des moyens financiers mais de gros freins. Certains auront besoin de plus de temps pour y arriver mais on a toute une vie pour être heureux. Le fait de se mettre en chemin, c’est déjà tendre vers le bonheur.

Je suis resté dans la banque où je travaillais deux ans alors que je savais que j’allais partir. Ça a tout changé.

Je me souviens qu’on avait un jour eu une grosse crise au centre d’appels. Les gens couraient dans tous les sens. Mon chef me dit: « t’es hyper zen » alors que lui en avait perdu le sommeil.

En fait, j’étais déjà dans autre chose, dans la joie d’emprunter bientôt la route du bonheur.

Vous dites qu’en nous concentrant sur ce qui est bon et essentiel pour nous, on se concentre en fait sur ce qui est bon et essentiel pour notre société.

Oui. Se recentrer sur soi-même, écouter sa voix, ça nous relie aux autres.

Un exemple tout bête: le père qui prend un congé parental pour rester avec ses enfants, parce qu’il a envie de consacrer du temps à ce qu’il aime le plus au monde, c’est quelque chose qui fera du bien à sa famille, ses enfants et sa femme seront plus heureux.

C’est un dialogue entre l’intérieur et l’extérieur tout le temps, ça nourrit une solidarité.

Le discours que vous avez prononcé à l’ULC, vous l’avez répété souvent avant de le dire et pourtant, vous dites que les larmes affluaient à chaque fois…

Encore maintenant. Il y a quelque chose qui me touche énormément dans ce qui est de l’ordre de la désobéissance, du changement, de cette relève dont je parle souvent.

C’est quelque chose que je ressens quand je vois mes enfants, leur insouciance, quand ils dorment les bras et les jambes écartés, dans un sommeil hyper profond. Si on pouvait tous revenir à ça.

Si on pouvait détricoter tout ce qu’on nous a mis sur le dos… Je suis ému par les gens qui osent se lever.

J’ai un jour mangé avec quelqu’un qui m’a raconté qu’après avoir écouté mon discours, il a passé la nuit à vomir. Il y a un truc énorme qui a été déclenché par ces mots. C’est hyper puissant, hyper touchant.

Vous encouragez les gens à désobéir pour être heureux?

C’est délicat parce que mes enfants me demandent s’ils peuvent me désobéir… Disons qu’il faut devenir adulte de sa propre vie.

Devenir adulte, ça ne veut pas dire qu’on rejette tout. Tout rejeter, c’est être un adolescent rebelle. Ici, on parle de remettre en question.

On a été abreuvés toute notre vie par notre famille, par le système, nos supérieurs… Il faut remettre en question. J’ai compris que je n’avais pas besoin d’être parfait pour être heureux.

La société, mon père, mon patron m’avaient dit ça, mais ce n’était pas vrai. Il y a une faute à un endroit dans mon livre. Je l’ai laissée exprès. Ça ne me rend pas heureux d’être parfait.

C’est pareil pour le Covid: est-ce qu’on ne pourrait pas remettre certaines choses en question.

Ça ne veut pas dire que je ne vais pas mettre mon masque ou ne pas respecter les distances mais on peut se demander, par exemple, si un couvre-feu sert vraiment à quelque chose?

Il faut remettre en question et désobéir, quand ça nous fait sens.

Achetez « Matins clairs » de Pedro Correa.




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