On dit souvent que pour arrêter d’être impressionné par quelqu’un qui nous en met plein la vue, il suffit de l’imaginer aux toilettes pour que l’angoisse disparaisse. Je me dis que quand mon fils aura 16 ans et l’envie de me claquer la porte de sa chambre au nez, je lui rappelerai que je l’ai vu assis sur le pot et s’applaudir en faisant pipi, c’est lui que ça devrait calmer.
Petit E. a deux ans dans moins de dix jours et on vient de débuter la phase la moins romantique de l’éducation: l’apprentissage de la propreté. En Belgique, on commence l’affaire souvent un peu plus tard. On envisage tranquillement de rendre les enfants propres pour 2 ans et demi, 3 ans, en tout cas pour l’entrée à l’école. En Californie, à deux ans, plus aucun gamin n’a du rembourrage aux fesses et pourtant, les maternelles commencent à 4 ans. Bref, à force de m’entendre demander si Petit E. était « potty training », j’ai lancé les festivités… ou plutôt les hostilités. J’ai eu l’idée totalement nulle de débuter l’apprentissage du pot quand mes beaux-parents nous rendaient visite. Ne me demandez pas pourquoi, je ne sais pas moi-même. Petit E. pleurait en s’asseyant sur son trône et redoublait de larmes s’il avait le malheur de réussir à faire ce que je lui demandais. Bref, fiasco, j’ai arrêté le calvaire au bout d’une grosse journée pour reprendre une semaine plus tard, enfin seuls. On a recommencé notre petite affaire il y a cinq jours.
Toutes les mères américaines me parlent ici d’une méthode en trois jours. TROIS JOURS! Déjà, j’ai foiré… Ici, on apprend aux petits à être propres comme on enlève un sparadrap: d’un coup sec et sans faire de chichi. La méthode est simple: tu lui enlèves son lange, tu lui mets un short sans sous-vêtements et tu places le pot en évidence en lui proposant régulièrement d’y aller. Pourquoi sans sous-vêtements? Parce que les élastiques d’un slip ou d’une petite culotte pourraient faire croire au petit coquin qu’il s’agit d’une couche et il se laisserait du coup un peu trop facilement aller. S’il ne se sent pas soutenu, il hésite… et il apprend à se retenir. Ma voisine précisait que l’apprentissage de la propreté se fait ici de jour comme de nuit. Oui, en même temps. En Belgique, on a tendance à commencer en douceur, d’abord la journée quand on est à la maison. Puis on commence à enlever le lange à l’extérieur quand on sait qu’on pourra réagir promptement en cas de besoin. Et enfin, on ose tenter une sieste, puis une nuit. Je suis tiraillée entre l’envie que ça se passe vite et bien (pour tout le monde) et la peur de traumatiser Petit E. Les Américains sont des gens curieux: autant il est interdit de s’emporter publiquement contre son enfant (ils ne haussent jamais la voix sur leur progéniture, je ne sais pas comment ils font), autant le bousculer dans son apprentissage de la propreté est normal. Je ne dis pas que c’est mal, juste que c’est un peu paradoxal.
Sur conseils de mes copines qui sont passées par là avant moi, j’ai proposé à Petit E. de coller un autocollant de son choix sur son petit pot à chaque victoire. Ca l’a amusé une journée. Je lui ai proposé de venir vider ses petites affaires dans les grandes toilettes et de tirer la chasse lui-même. Là encore, après une journée, s’il savait vraiment exprimer toutes ses pensées clairement, il m’aurait dit: « Oui, bon, ça va, j’ai compris. » J’ai bizarrement l’impression qu’il a déjà compris qu’il fallait bien évacuer le problème, que je n’allais pas le lâcher, et quitte à ce que ça se fasse, autant ne pas trop perdre de temps. Il s’exécute sans trop râler, en n’oubliant jamais d’allumer son petit train électrique pour le regarder passer. Cet enfant a déjà compris le concept de joindre l’utile à l’agréable… J’ai quelques livres à disposition aussi sur un petit oiseau qui « doit y aller » (« J’y vais » de Matthieu Maudet) et « Petit Loup va sur le pot ». Ca sert en cas de résistance.
Parmi mes petits conseils sur base de ces premiers jours agréablement positifs, je dirais d’entamer cette période particulière quand on a le temps et que l’autre parent doit s’impliquer aussi. Au début, Petit E. pensait que c’est quelque chose qu’il ne devait faire qu’avec moi… Soyez attentifs aux bruits que fait votre enfant. Le mien n’énonce pas encore clairement le problème. J’ai le plus souvent droit à une exclamation ou un gémissement quand il mouille son short. Et parfois, occupée à autre chose, je mets deux secondes de trop à comprendre ce qu’il me veut… Je dirais de ne pas le forcer à absolument s’asseoir sur le pot: s’il est en train de jouer, il a tendance à protester avec ardeur. J’attends parfois cinq minutes pour revenir à la charge et ça suffit souvent: il se lasse vite de ses activités, il est prêt alors à faire autre chose et il s’assied sans résistance. Même si on est surpris et qu’il vient de ruiner le canapé, on ne le gronde pas s’il rate son coup. On suppose (en tout cas, on espère), avec toute la patience et l’amour que la maternité implique, qu’il fait de son mieux… On prévoit le coup, avec quelques serviettes épaisses à glisser sous ses fesses, de quoi sauver le tissu du clip clap Ikea en cas d’accident.
Evidemment, on attend qu’il soit prêt et sur ce point-là, un enfant n’est clairement pas un autre. Moi je pars du principe que si Petit E. comprend très bien quand je lui dis: « Tu finis tes fruits d’abord, et tu auras du chocolat après », il peut tout à fait comprendre à quel endroit il est censé faire pipi. Ca faisait aussi quelques semaines qu’il me signifiait ce qu’il était en train de faire en touchant son lange. Et j’avais lu qu’un enfant sachant monter et descendre les escaliers tout seul est un enfant qui a les muscles et les sphincters bien entraînés et qui sait donc se retenir.
Reste qu’il est malin: il sait effectivement se retenir… Il attend patiemment que je lui remette une couche pour une sieste et une promenade pour ouvrir les vannes. Ca sent l’arnaque à plein nez! Les Américains, finalement, ont peut-être raison sur la méthode: il ne faut pas lui laisser de plan B. Petit E., mon chéri, maman n’a pas dit son dernier mot.
5 comments
A chaque fois que j’ai essayé de rendre mes enfants propre j’ai foiré. Au final c’est quand j’ai laissé tomber et que je me suis dit ça viendra quand ça viendra qu’ils sont devenus propres du jour au lendemain
Oui en fait, ils font bien ce qu’ils veulent ?
Viens de ce bord ci de la frontière, avant trois ans on est laaarge. Tempête, du haut de ses 26 mois est l’extraterrestre de son groupe. Quand j’ai demandé, à l’époque, à ce que les éducatrices m’aident un peu en prenant le relais à la garderie, on m’a clairement fait comprendre que ça posait un problème technico-pratique !
Il a 2 ans dimanche. Je suis encore dans les temps mais j’ai la pression. :-))) A la gym, le vendredi, j’ai une grand-mère qui ne cesse de me demander comment se passe son potty training. Mais laisseeeeez moi! Pendant ce temps, le petit s’en fout complet. Ca ne le dérange pas de s’asseoir ni de rester cul nul mais il joue, il papote, il m’appelle et il ne fait rien de ce qu’il devrait faire. :-)) Ca ne devrait pas, mais en fait ça me fait assez rire ce côté têtu à mort!
Il faut pas s’occuper des autres. Ton enfant sera propre quand il sera prêt. Bon courage