L’enfant unique est-il plus horrible qu’un autre? L’enfant unique a mauvaise réputation. Ayant fait le choix d’avoir un enfant unique, forcément, ça m’interroge. On est toujours rattrapé par ce que la société dit de nos choix.
Dès que l’on sort du rang, on se retrouve à devoir justifier sans cesse notre décision. Décider d’avoir un enfant unique est vu comme quelque chose d’étrange ou d’anormal. Mais pourquoi?
Pourquoi l’enfant unique est-il décrit comme un monstre d’égoïsme, associable et pourri gâté? Pourquoi l’enfant unique est-il encore autant décrié dans une époque où il devient pourtant la norme?
L’enfant unique est de plus en plus fréquent
La famille traditionnelle est en pleine mutation. Selon un article du Financial Times paru en 2019, en Angleterre, 40% des couples mariés n’avaient qu’un seul enfant et parmi les couples cohabitant ou les parents solos, la proportion était encore plus élevée.
Aux États-Unis, 23% des familles étaient composées de deux parents et d’un seul enfant. En 1976, 4 mères américaines sur 10 âgées de 40 à 44 ans avaient au moins 4 enfants.
L’enfant unique n’est plus si… unique. Mais quand on cherche des infos à son sujet, la majorité est déprimante.
Je suis tombée sur un article titré: “Enfant unique: est-ce un handicap?“
J’ai trouvé le mot handicap si fort (même s’il est dit sous couvert d’une question) que j’ai décidé de me pencher sur les pires phrases qui ont été dites sur les enfants uniques dans le passé et qui pourraient expliquer pourquoi ils sont encore tant jugés aujourd’hui.
Les choses atroces qui ont été dites au sujet de l’enfant unique
(et qui peuvent expliquer pourquoi il est encore vu comme “anormal”)
“L’enfant unique est une maladie en soi”
En 1896, la plus grande étude jamais réalisée sur des enfants était menée par des chercheurs de l’université de Clark de Worcester dans le Massachusetts.
Ils ont envoyé un questionnaire aux enseignants de toute la région en leur demandant de leur raconter des récits d’enfants “particuliers et exceptionnels”.
1045 cas ont été répertoriés et deux grandes catégories d’enfants “particuliers et exceptionnels” ont été repérées: les enfants immigrés et les enfants uniques.
À la suite de ces premiers résultats, les chercheurs ont entrepris de s’intéresser de près à des centaines d’enfants uniques.
Ils ont été étudiés du point de vue de la santé, de la façon dont ils s’adaptaient à l’école, leur vie sociale a été passée au crible.
G. Stanley Hall, premier président de l’American Psychological Association, supervisait l’étude. Il était le spécialiste de l’enfance à l’époque. Il a résumé: “Être un enfant unique est une maladie en soi.” Ouch, ça commence fort.
“Ça serait mieux pour la race humaine qu’il n’y ait pas d’enfant unique”
En 1912, dans son livre “Psychoanalysis, its theories and practical application”, Abraham Arden Brill, psychiatre américain, écrit: “Ça serait mieux pour l’individu et la race humaine qu’il n’y ait pas d’enfants uniques.” Carrément!
Dans le chapitre “The only or favorite child in adulte life“, il écrit: “L’enfant unique est généralement gâté et choyé parce que ses parents satisfont à tous ses désirs et n’ont pas le cœur à être sévère avec lui ou à le punir si nécessaire.”
“Cela a des conséquences néfastes dans sa vie d’adulte, car la moindre dépréciation à peine perceptible par le commun des mortels suffit à le plonger dans un accès de rage et de dépression qui dure des jours, voire des semaines.”
“C’est à cause de l’attention sans partage et de l’amour anormal que l’enfant unique reçoit de ses parents qu’il devient un égoïste confirmé. Il n’est jamais délaissé au profit de ses frères et sœurs.”
“L’enfant unique est le seul chef de la maison et ses louanges sont constamment chantées. Ce n’est donc pas étonnant que l’enfant unique devienne vaniteux et développe une opinion exagérée de lui-même.”
“Plus tard, il sera vaniteux, jaloux et envieux. Il en veut à ses amis quand ils sont heureux et il est donc évité et détesté.”
Tu m’étonnes qu’après, tout le monde trouve qu’être enfant unique, c’est horrible!
“L’enfant unique est un handicapé qui n’a pas les mêmes chances que les autres”
En 1960, pour le Dictionnaire de psychopédagogie, la définition de l’enfant unique était la suivante: “L’enfant unique est, au départ, malgré les apparences, un handicapé qui n’a pas les mêmes chances d’adaptation et de réussite que les autres.”
“Adoptez un deuxième enfant si vous ne pouvez plus en avoir”
Dans un article titré “The Only-Child Syndrome” et paru en 1968, le prestigieux journal New York Times conseillait aux parents d’adopter un deuxième enfant s’ils n’étaient plus en mesure d’en avoir un naturellement.
“Ne vous mariez pas avec un enfant unique”
En 1979, l’écrivain George Crane disait aux gens de ne pas se marier avec un enfant unique. “Leur irrationalité et leur inflexibilité”, affirmait-il, “rendent le divorce plus probable.”
Il est temps de mettre un terme aux aprioris: non, l’enfant unique n’est pas plus horrible qu’un autre
Ca ne m’étonne pas, après ça, que tout le monde se dise qu’être enfant unique, c’est horrible!
Ces phrases violentes ont été inscrites dans la mémoire collective et répétées par nos grands-parents et nos parents. Il est grand temps de déconstruire tout ça.
D’autant que des études plus récentes qui montrent qu’un enfant unique n’est pas plus ou moins unique qu’un autre.
Il est temps de laisser une chance aux enfants uniques comme on a appris à accepter l’existence des familles recomposées.
De se rappeler qu’ils n’ont pas choisi d’être enfant unique. Et qu’ils n’ont pas à “payer” la décision de leurs parents.
Il faut s’offusquer aujourd’hui de ces phrases choquantes, de ces a priori pesants sur les épaules d’enfants qui n’ont rien demandé. Personne n’aime être défini par des “on dit” avant même d’avoir ouvert la bouche.
Ne stigmatisons pas les enfants: on déteste quand les autres le font avec nous!
Et rappelons-nous: on peut être fier d’être enfant unique, comme on peut être fier d’avoir des frères et sœurs. On ne choisit pas sa famille et le seul fait d’être enfant unique n’est pas une tare.
Laura Gélin, psychanalyste à Paris, rappelle à ceux qui en doutent encore: “Nous sommes tous des adultes différents. Aucune famille ne se ressemble.”
“Effectivement, être enfant unique, ce n’est pas la même histoire ou la même construction que de naître au sein d’une fratrie nombreuse, d’être l’aîné ou d’avoir un grand écart d’âge avec ses frères et sœurs.”
“C’est une singularité, mais une singularité au même titre que les autres. Chaque schéma a sa particularité. Il n’y en a un mieux que l’autre. Dans chaque modèle familial, on trouve des avantages et des inconvénients.”
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