Pourquoi je déteste aller chez le coiffeur

by seayouson

Il y a des choses dans la vie qui me terrorisent mais, parce que je fais ce que je peux pour rester dans une certaine normalité malgré mes idées farfelues, je prends sur moi, je serre les dents et les fesses, et j’y vais quand même. J’ai, par exemple, peur de l’avion alors que je voyage souvent, mais je monte dedans et je m’attache sans broncher même si j’ai toujours envie de signaler qu’en cas de crash, je ne vois pas très bien ce que ça peut empêcher. Je déteste aussi profondément m’asseoir dans le siège en cuir supposé confortable du coiffeur. Ça commence toujours mal : je ne trouve pas ma position. Je croise les jambes, je les décroise, je m’assieds sur une demi-fesse parce que sinon ça glisse un peu, je me redresse, mais je souris pour garder la face en gigotant. J’ai presque l’air heureuse d’être là. Détendue et confiante. Face au miroir, tandis que mon bourreau s’en va chercher ses instruments de torture, je m’observe avec attention et je me demande, à chaque fois, pourquoi je suis là. Personne ne m’a jamais dit que j’étais si mal coiffée qu’il fallait urgemment que je prenne un rendez-vous mais je suis régulièrement entraînée chez le coiffeur par mon double diabolique qui me fait croire que je veux me réinventer. En vrai, je voudrais juste être « moi en mieux ». À la sortie, ça ne manque jamais : je ne me reconnais pas. Je trouve que ça me grossit ou qu’au contraire, j’ai les joues creusées, que ça me vieillit ou que j’ai l’air d’une gamine.

Dans la vie, j’ai tout tenté. De la coupe de Natalie Imbruglia période « Torn » alors que j’ai les cheveux naturellement bouclés à celle de Meg Ryan dans « La cité des anges » croyant que ça collerait mieux à ma fibre capillaire; j’ai eu une période un peu grunge avec les pointes teintes en rouge, des bas résilles et une barre dans le nombril; une coupe au carré qui avait plutôt l’air d’une coupe au bol et j’ai osé toutes les longueurs de frange pour m’entendre dire à chaque fois lors de la repousse fastidieuse : « Plus jamais ». Depuis, j’ai mûri et je sais ce qui me va. En tout cas, je connais mes cheveux et la coupe que je dois avoir pour qu’ils daignent se remettre en place après un séchage express, voire même, pas de séchage du tout (toi, la mère d’un enfant en bas âge, tu sais). Et pourtant, une fois sur deux, je ressors du salon dépitée avec l’envie furieuse d’aller acheter un bonnet. Je ne vous raconte même pas le désarroi quand le coiffeur qui te rate vit dans le désert californien où il fait 30 degrés toute l’année. Une casquette peut-être?

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Sans le savoir, je suis prise d’une maladie une fois la porte de cet antre de l’enfer (oui, il en existe plein) poussée: je me mets à parler russe ou polonais et personne ne semble comprendre ce que je suis en train d’exposer. C’est en tout cas l’impression qu’on me donne. Les gens ont l’air bienveillant, ils hochent la tête en me souriant mais je vois bien dans leur regard vide qu’ils ne comprennent pas un mot de ce que je raconte. J’en ai la confirmation dès les premiers coups de ciseaux: j’avais dit 2 centimètres maximum, le coiffeur en ampute généralement 7. On n’a, c’est sûr, pas le même compas dans l’œil. Et visiblement, l’un de nous deux, en prime, est daltonien si j’en crois les reflets mauves aussi prononcés qu’indésirables qui se révèlent après la pause de la teinture dans les quelques poils qu’il me reste sur le crâne…

Je déteste aller chez le coiffeur depuis toujours mais particulièrement depuis la naissance d’Ezra. En accouchant, j’ai perdu ma dignité et ma masse capillaire. Quelqu’un quelque part semble avoir décrété que ça va, à la loterie des bébés, elle a tiré l’enfant qui dort, elle ne va pas en plus frimer avec des cheveux épais et brillants. J’ai perdu une épaisseur considérable dans les mois qui ont suivi l’arrivée de mon fils et le problème, s’il s’est stabilisé, ne s’est pas arrangé. J’ai essayé les compléments alimentaires. Heureusement que je ne prends pas ma pilule contraceptive avec la même régularité parce que j’aurais déjà au moins sept enfants… J’ai essayé les cures capillaires avec des fioles de produit à appliquer directement aux racines. Mais ça se vend par boîtes de 10 et doit s’utiliser pendant six semaines (une éternité) pour un début de résultat. Ca coûte un bras, du coup j’en achète petit à petit, puis j’oublie et je ne vais jamais au bout de la cure. J’attends un miracle et d’ici-là, j’aimerais bien qu’on évite de couper mes cheveux n’importe comment parce que ça ne les encourage pas à sortir, les petits nouveaux. Comment ça, c’est trop tard ?

J’aimerais retrouver mes cheveux de petite fille, ceux qui n’ont encore rien subi, si ce n’est une légère mise en forme. Je fantasme sur la tignasse de ma nièce de dix ans, naturellement blonde, impressionnante d’épaisseur et de longueur. Je regrette les traitements que j’ai infligés à la mienne, les audaces, les coups de rasoir, les manipulations chimiques, les teintures qui n’étaient pas nécessaires puisque je n’ai pas encore de cheveux blancs (ou si peu). Je reporte ma sensibilité capillaire sur mon fils qui n’en demandait pas : je tarde à l’emmener chez le coiffeur, il a le front perpétuellement balayé par des cheveux trop longs et la nuque d’un footballeur des années 80, je tourne autour du coiffeur qui s’occupe de lui comme un fauve affamé en répétant « pas trop court, pas trop court, non pas de rasoir ». Ça tient de la pathologie. Ou plutôt du traumatisme.

Mon angoisse du coiffeur est un syndrome post-traumatique. J’ai trop souffert de ne pas avoir été écoutée, prise au sérieux, respectée. Je me souviens des essais coiffure de mon mariage: un moment humiliant avec un coiffeur aussi connu que prétentieux à Bruxelles qui me prenait pour une idiote parce que j’avais acheté un headband que j’adorais aux Etats-Unis et qu’il n’arrivait pas à le faire tenir. « On verra ça le jour J », m’avait-il dit. Je ne l’ai jamais revu et j’ai pris un rendez-vous en urgence ailleurs. Et là, si la coiffeuse était adorable, ce n’est pas elle qui s’est présentée le jour J comme c’était pourtant prévu. La coiffure qu’on m’a faite le jour de mon mariage n’avait pas grand-chose avoir avec celle sur laquelle on était tombée d’accord lors de l’essai.

Alors voilà, comme j’ai attendu de trouver le bon mari, j’attends de trouver le coiffeur qui saura me rassurer, m’étonner, m’écouter. Et en attendant, parce qu’il faut bien y aller de temps en temps pour ne pas avoir l’air d’un épouvantail, je savoure la seule chose que j’aime: le thé qu’on me propose pour patienter.

Si vous avez des bonnes adresses (en Belgique de préférence), n’hésitez pas les partager en commentaires.

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7 comments

Cendra 12 mai 2018 - 17 05 18 05185

Je suis pareil! Je fais un coiffeur puis je n’y retourne plus, du coup j’ai dû en faire une vingtaine facile depuis mon adolescence (sachant que je n’y vais qu’une à deux fois par an).
J’ai beau expliquer ce que je veux, on me fait toujours une coupe « standard » et ne parlons pas des couleurs, même lorsque je précise « mais dites moi, hein, ce qui est possible sur mes cheveux, je veux pas vous demander une couleur qui ne rendra pas sur mes cheveux… ».
Du coup, je me coupe les cheveux moi même depuis peu! Ma coupe actuelle (carré long flou) est plutôt simple à réaliser et franchement j’suis super contente de mon coup de ciseau! héhé 😀

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WorkingMutti 12 mai 2018 - 19 07 02 05025

J’avoue que je ne suis pas super à l’aise chez le coiffeur non plus. La seule partie que j’aime c’est celle du shampooing massage de crane. Mais je ne ressors jamais avec la couleur que je souhaitais …

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Laura 14 mai 2018 - 9 09 19 05195

Carlea place de Linkebeek, il parle beaucoup, c’est un peu long et un peu cher mais j’y vais depuis 13 ans. Les colorations sont magnifiques, réalisées par sa femme. Question coupe, je n’ai jamais été déçue 🙂
(il n’ouvre plus que sur rdv maintenant)
Petit plus, le salon est très beau, Carlo y expose les photos de ses précédents voyages ainsi que quelques œuvres d’art. Bonne chance ! 🙂

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pellicule de vie 16 mai 2018 - 15 03 18 05185

Haaa le coiffeur… j’ai aussi connu des déception. Ici je n’y vais que 1 fois par an ou voir tous les 2 ans.. Pour les colo, je n’avais pas les moyens et surtout pas l’envie de dépenser autant d’argent. Lol. Je suis aller l’année passée couper mes bouts (cheveux longs) et elle n’a coupé que les bouts ?

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seayouson 19 mai 2018 - 13 01 59 05595

La chance!

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Lolagona 16 décembre 2020 - 18 06 24 122412

Essayez les écoles de coiffure ! La première fois que j’ai testé j’avais la boule au ventre, je l’avoue, de peur qu’on me rate ma coupe. Mais a chaque fois que j’y vais j’ai une super coupe de cheveux, les apprenties coiffeuses écoutent vraiment ce qu’on leur demande et sont de très bon conseils si jamais quelque chose ne nous irait pas. En plus elles sont formées tout le temps aux nouvelles techniques etc… Franchement à chaque fois que j’y vais j’en suis très satisfaite et en plus c’est deux fois moins cher que chez un coiffeur normal. Les professeurs sont à côté, et avant de faire quoi que ce soit, l’élève montre au prof comment il s’apprête à faire avant de couper, et le prof valide ou pas. Ils font très attention à a ce que les élèves fasse bien le travail demandé.

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