“Ah ben, on sait qui porte la culotte chez vous!”
“Rho, moi, je ne pourrais pas.”
“Mais tu vas t’ennuyer, non?”
“Moi je n’aimerais pas que mon mec gagne moins que moi.”
“Moi je n’aimerais pas gagner moins que ma femme.”
10 mois, ça fait 10 mois que mon homme a quitté son job sans un regret pour m’accompagner et me soutenir dans mon projet professionnel. 10 mois qu’on a renoncé à un certain confort financier pour l’aventure. 10 mois qu’on vit en Californie et qu’il s’occupe à temps plein de notre enfant, sans rentrée d’argent parce qu’il ne détient pas le précieux sésame l’autorisant à travailler sur le territoire américain.
Mon mec est un papa moderne qui n’a jamais rechigné à se lever la nuit pour donner un biberon (ou en tout cas pas plus que moi), qui était même heureux de ce moment de connivence, de tête-à-tête et de silence avec son fils dans la pénombre. Un papa qui a souhaité consacrer un jour de sa semaine à son enfant dès sa naissance et qui s’est arrangé pour pouvoir le faire. Pour finir par accepter de lui en consacrer sept…
Ezra ne le sait pas encore. Ou peut-être que si? Mais son papa est un homme qui n’a pas peur d’inventer le père qu’il veut être. Un papa câlin, aimant, autoritaire quand il le faut, juste ou en tout cas autant que possible. C’est un papa qui fait des blagues de papa, des “tatouilles” sur le ventre et des “prouts” dans le cou, des soupes et des compotes maison et même des crêpes pour le petit-dej en pleine semaine. Evidemment, cette année, ça n’a pas toujours été simple: le quotidien avec un enfant de deux ans, c’est éreintant. On se répète tellement qu’on a l’impression, à force, de devenir un peu dingues. On éduque sans cesse, on explique, on détaille, on insiste, on développe, on argumente, on n’a jamais le temps de souffler. C’était 10 mois d’effort et de joies intenses, de fierté aussi de voir le marmot pousser si bien grâce à notre seule énergie. S’installer à l’autre bout du monde, c’est ne pas avoir de grand-mère pour épauler ou de copains avec qui décompresser.
Mais c’est un papa qui a tenu le cap sans jamais flancher ou si peu. Qui a fait des tours en vélo même quand il aurait aimé se poser dans un rayon de soleil, qui a nourri des canards au lieu d’écouter un podcast, qui s’est parfois effondré de fatigue à 20 heures, qui a supporté le fait de ne pas gagner d’argent et de me voir en gagner. Et qui m’a dit récemment qu’il était temps que ça revienne à la normale, qu’il se remette à travailler, non pas parce qu’il en a marre mais “parce que je ne peux rien t’acheter puisque c’est ton argent”.
Ezra a la chance d’avoir un papa qui n’a rien à prouver, qui sait qui il est et pourquoi il l’a fait. Qui supporte sans broncher l’ingratitude de son petit garçon qui se jette dans les bras de sa maman alors qu’il est pourtant juste à côté pour le consoler. Mon mec est un papa moderne, présent, attentif, qui n’oublie non plus d’être un mec. On parle toujours de ce combat quotidien que les femmes mènent: il faut être mère et épouse, maman et maîtresse, avoir l’instinct maternel mais ne pas oublier son aura sexuel, prendre du temps pour soi mais sans empiéter sur celui qu’on accorde à ses enfants.
En regardant mon homme, je pense au combat des pères. A ceux qui vont conduire les enfants à la crèche et à l’école quitte à arriver en retard au boulot, à ceux qui y retournent parce que “le petit a de la fièvre”, à ceux qui cuisinent après avoir donné le bain aux gnomes, à ceux qui font même la vaisselle après. Et tout ça sans en faire un fromage, en trouvant ça normal, de partager le travail et un peu de la charge mentale. Bon, ne rêvez pas trop quand même: ça, c’est quand même un truc de fille. La projection, l’organisation, la planification, ça reste mon truc. Mais il sait aussi ce que c’est: quand je pars en mission pro, c’est lui qui gère Ezra de A à Z, des chaussettes à la casquette, avec toutes les petites pensées parasites que ça génère dans sa journée.
Je pense aux commentaires gratuits et inutiles, jamais méchants mais maladroits, qu’on lui a faits et qui auraient dû l’énerver mais ont glissé sur son dos de papa sur lequel son petit garçon grimpera bientôt, quand il aura moins peur. À ces remarques qui auraient pu le faire douter de sa virilité, de son importance au sein de notre couple ou même, au sein de la société. Big Up à tous les hommes qui sont les pères qu’ils ont envie d’être, peu importe les règles soi-disant imposées et les regards en coin.
12 comments
Enceinte de 7 mois et je découvre mon mec à moi dessiner les prémisses son rôle de père. Ses envies et sa manière de vouloir vivre avec son petit bout à naître.
Au debut, il ne savait pas trop comment aborder cette paternité naissante.
Je me souviens lui avoir proposer des lectures, le livre d’un père sur la paternité et le bouleversementque cela lui a provoqué (me souviens plus du nom) et il m’avait dit “Non, je préfère faire seul à mon rythme”. Je le reconnais tellement bien dans cette réponse.
Au fur et à mesure, il dessine, invente, s’exprime sur ce rôle qui sera le sien.
Je crois (peur être à tord) que certains choix ou décision que nous évoquons à 2 ds notre bulle en questionneront certains de notre entourage.
Pour moi, le tout est de vouloir lui laisser cette place, le soutenir dans ses choix et surtout être heureux ensemble dans ce qu’on fait.
Bref, j’ai envie de terminer en vs disant que je me sens très proche des mots et des textes que vous écrivez et même si notre bébé n’est encore qu’à naître… Merci pr ce récit de vie. ?
A très vite!
Peu importe vos choix finalement: s’ils vous rendent heureux et épanouis, votre entourage n’y trouvera pas grand-chose à redire! 🙂 Bonne dernière ligne droite! Et bonne découverte des parents que vous allez devenir… 🙂
Billet parfait et qui résonne beaucoup chez moi, comme toujours. Big up à ton mari. Une petite remarque : je t’assure que la planification n’est pas que un truc de fille. Moi par exemple je ne planifie rien de l’organisation logistique du petit, a part les fringues. Et mon mec c’est inverse, jusqu’à l’extrême, car il se stresse énormément avec ça (il n’aime pas improviser et on ne part jamais sans le quota précis de jouets et de nourriture).
Je gère aussi les fringues et lui la bouffe généralement. Et il sait faire le sac seul si nécessaire même si on est pas à l’abri d’un oubli de doudou… (Enfin ça arrive moins maintenant qu’Ezra y pense lui même!) Mais sinon pour les rdv médicaux, les horaires de stage, de crèche, les activités du coin, je suis celle qui fournis les infos. 🙂 Je faisais surtout référence à la BD d’Emma (https://emmaclit.com/2017/05/09/repartition-des-taches-hommes-femmes/) sur la charge mentale. Vu la réaction générale à l’époque de sa publication, ça avait l’air d’être globalement un truc de filles. Big up à ton mec aussi en tout cas! C’est bien de savoir s’organiser avec un môme en bas âge.
Un super mec et un super papa qui a bien raison de laisser filer les commentaires nazes !
Après je pense que beaucoup de commentaires sont juste maladroits… Les gens se rendent pas tjs compte que tu fais des choix d’éducation peut-être différents mais ça reste des choix qui viennent du coeur et qui sont réfléchis. Du coup ils commentent, ça sort sans réfléchir et bon, ça peut être un peu énervant. 😀
Un super papa! Je serais ravie à l’occasion s’il venait se présenter et nous parler de son rôle de super papa dans ma chronique collaborative ‘la vie secrète des papas’, je trouve que son témoignage serait super intéressant, si ça vous tente! (détails par là au cas où : http://www.picou-bulle.com/les-papas-presentation.html)
C’est une très bonne idée de donner la parole au papa! Je lui en parle… Mais j’avoue que j’avais l’idée de me réserver la primeur de son témoignage. Peut-être sous forme de podcast. Affaire à suivre… 🙂 Bravo pour ta rubrique! Je l’avais déjà repérée!
Un super papa qui a décidé de ne pas suivre la pression sociale ! Ezra se rendra s’en doute compte un peu plus tard qu’il a un papa hors norme qui a fait des choix suivant votre mode de vie pour le bonheur de tous.
Un bel article sur ton conjoint qui le mérite bien
Merci! Le message est transmis au papa… 🙂
Wow, magnifique. On est tellement influencés par les diktats, qu’on ne se rend pas compte que ce ne sont que ça, au final, des diktats et qu’on n’est pas obligés de les suivre si on se sent de faire autrement. Bravo à vous !
C’est sûr que c’est une sorte de ligne de conduite de ce blog et dans ma vie: suivre ses envies et faire fi du regard des autres et des pseudo obligations le plus possible. 🙂 Merci. 😉