Il y a quelques jours, j’ai assisté, émue, au premier mensonge de mon enfant…
On parle toujours des premiers sourires, des premiers pas, des premiers mots, des premières nuits. Il existe des livres (et certains plus jolis que d’autres) qui encouragent à compiler tous ces moments qui font la première année d’un enfant. On ne donne pas, et c’est dommage, la même importance aux premières fois qui suivent. Bien sûr, on évoque rapidement les grandes étapes : le premier pipi dans le pot, la première entrée à l’école… Mais on ne parle jamais des petites premières fois. Les discrètes.
Celles qui semblent normales aux yeux des autres mais qui font déborder les yeux et/ou le cœur des mamans. J’ai surpris récemment mon fils en flagrant délit de mensonge. C’était la première fois qu’il tentait, très sérieusement, de m’arnaquer. Il ne mentait pas pour rire ou parce qu’il s’inventait une nouvelle réalité insolite. Il mentait délibérément, en sachant très bien que ce qu’il avait fait n’était pas classé aux rayons “bonnes actions”.
Et le premier mensonge de mon enfant m’a émue plus que ça m’a énervée.
Pourquoi le premier mensonge de mon enfant m’a émue
En le regardant avec ses yeux de merlan frit et ses joues un peu rouges me jurer que non, ce n’était pas lui qui avait caché du chocolat dans sa chambre, j’ai pris conscience du pas qui venait d’être franchi.
Il a compris le principe du mensonge, il sait désormais l’utiliser à bon escient, ça veut dire qu’il va désormais être heurté par les mensonges des autres, qu’il va remettre en doute certaines choses que je lui dis (ne ment-on pas parfois un peu pour le bien de nos enfants ?), qu’il va nous dissimuler des choses et essayer de nous manipuler. On entre dans une autre dimension de la maternité.
Mon bébé s’éloigne un peu plus, à chaque réflexion logique, à chaque déduction émise, à chaque blague tentée.
Sa première blague, d’ailleurs, elle aussi, elle m’a cueillie par surprise. J’ai ri d’abord. Et j’ai été émue, ensuite. C’est aussi un pas de géant dans la compréhension du monde. Parce que pour faire une plaisanterie efficace, il faut comprendre les sous-textes, ménager son effet, ne pas rire même si on trouve ça drôle. On dit souvent qu’on peut être considéré bilingue quand on sait faire de l’humour dans une autre langue. Je crois qu’on peut se dire qu’un enfant est désormais grand quand il sait faire marrer ses parents avec un jeu de mots bien placés.
Elles sont nombreuses, les premières fois, dans la vie d’un enfant. Et elles le sont tout autant dans la vie d’une mère. Aucune n’est sans importance : ces petites premières fois sont les marches qui mènent la petite personne qu’on a mise au monde indiscutablement vers l’âge adulte, l’indépendance et le départ du toit familial. Ces premières fois semblent minuscules, insignifiantes, il n’y a qu’une maman pour les voir, je crois. Ou en tout cas, pour s’en émouvoir.
Il y a la première fois où il rejoint ses amis sans un regard et sans être triste, ensuite, de ne pas nous avoir dit aurevoir.
La première fois où, dans la salle de bain, il demande à avoir “un peu d’intimité”.
Les premiers mots qu’il déchiffre seul, sourcils froncés et concentration maximale, un livre sur les genoux repliés.
Il y a aussi la première fois où il s’inquiète des états d’âme de ses parents. “Ca va maman? Pourquoi t’es triste?” Il prend enfin conscience qu’il n’est pas seul sur terre.
Ou encore celle où il nous prend la main en rue de son plein gré, et non pas parce qu’on l’oblige, juste parce qu’il est fier de s’afficher à nos côtés.
Ces premières fois semblent anodines mais elle gonfle mon cœur de fierté et de nostalgie. Je vois mon enfant grandir, je me vois vieillir. C’est à la fois merveilleux et terrifiant.
Si vous les apercevez, ces premières fois qui n’appartiennent qu’à vous, arrêtez-vous un instant pour contempler cet enfant qui grandit à chaque fois que vous clignez des paupières. Le temps file et c’est la dernière fois que vous assisterez à cette première fois là.